L’album s’ouvre sur les terrils de Marcinelle, dans la région de Charleroi en Belgique, le lieu de naissance de Spirou et des éditions Dupuis (lesquelles ont fêté leur centenaire en 2022).
Un jeune lecteur apprend que Spirou ne paraîtra plus : il est censuré par la propagande allemande comme toutes les autres publications jeunesse du pays (Petits Belges, Bimbo…), à l’exception de Bravo ! dont le propriétaire collabore avec l’occupant.
C’est insupportable pour le jeune enfant belge qui réunit ses copains du Club des Amis de Spirou, Georges dont le nom de code dans le club est « Fantasio 24 », Pierrot alias « Tif 38 », Paulo alias « Tondu 39 », Armand alias « Valhardi 17 » et enfin Miche alias « Spirouette 33947 », employée à l’hôtel Velter [1]dont on apprend au cours de l’histoire qu’elle est juive, et Flup alias « Spip 02 ». Ensemble, ils vont mener des actes de résistance.
Une deuxième séquence s’ouvre un jour d’hiver sur un cimetière en décembre 1944. Marcinelle a été libérée. Un groupe se recueille sur la tombe de deux enfants. Un homme, cheveux blancs en bataille, élégante moustache à la Maréchal Montgomery, reste planté, effondré, les larmes aux yeux, devant les deux sépultures.
Il s’agit de Jean Georges Evrard, alias Jean Doisy, alias Le Fureteur, l’animateur du Club des Amis de Spirou, qui culpabilise. N’a-t-il pas, par son action, envoyé ces enfants à la mort ? C’est dans cet aller-retour entre l’Occupation et la Libération que se partage ce récit qui mêle fiction et réalité à l’image de L’Espoir malgré tout, la tétralogie d’Émile Bravo qui raconte l’histoire de Spirou dans la tourmente de la Shoah.
Comme dans Irena, comme dans Simone, le dessin de David Evrard (rien à voir avec le héros de l’histoire) a la claire évidence du conte d’enfant. Mais ce qu’il raconte est terrible, il s’agit de la mort de deux enfants. Quelque chose d’inimaginable pour nos générations qui ont vécu presque 80 ans de paix en Europe, du jamais vu depuis des siècles, alors que la guerre est là, à 2000 km de Paris !
Jean-David Morvan qui a puisé ses sources auprès de témoins et d’historiens de renom, sait comment raconter tout cela de façon apaisée sans transiger sur les valeurs à transmettre. Un modèle du genre.
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
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Pour ceux que cela intéresse, Jean-David Morvan sera présent au Mémorial de la Shoah de Paris dans un débat intitulé :
"Spirou, une mémoire plurielle"
Avec la disparition progressive des témoins, la mémoire de la Shoah repose de plus en plus sur le travail des historiens, des chercheurs, des documentalistes qui doivent raconter ces histoires avec le plus de vérité possible. Mais aussi sur celui des artistes ! Depuis le Maus de Spiegelman, la production des bandes dessinées sur le sujet est conséquente mais rares sont les rencontres entre des figures réelles, victimes de la Shoah : Felka et Felix Nussbaum, et un personnage de bande dessinée aussi internationalement connu que Spirou. Emile Bravo et Jean David Morvan s’y sont essayés, mêlant, chacun à sa façon, fiction et Histoire. Ils sont confrontés à Christelle et Bertrand Pissavy-Hivernault, historiens du Journal de Spirou.
En présence des auteurs Emile Bravo et Jean-David Morvan, et des historiens Christelle et Bertrand Pissavy-Hivernault
Animée par Olivier Delcroix, journaliste au Figaro
INSCRIPTION NECESSAIRE :
https://billetterie.memorialdelashoah.org/fr/evenement/spirou-une-memoire-plurielle
Le 12 janvier 2023 à 19h30
Mais aussi
Le Dimanche 19 février 2023 :
« Shoah et BD : un sujet toujours d’actualité »->https://billetterie.memorialdelashoah.org/fr/evenement/shoah-et-bande-dessinee-un-sujet-toujours-dactualite]
[1] Robert Velter est le nom du créateur de Spirou.
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