L’Académie des Grands Prix du Festival d’Angoulême a donné le Grand Prix cette année à Blutch. De son vrai nom, Christian Hincker, Blutch est né à Strasbourg le 27 décembre 1967. C’est une des figures marquantes de ce que l’on désigne sous le vocable de « Nouvelle bande dessinée ». Après des études aux Arts-Déco de Strasbourg, il débute dans Fluide Glacial avec un graphisme situé dans le sillage d’un Daniel Goossens, voire de Morris mais aussi de Gus Bofa ou de Will Eisner.
Il acquiert sa réputation par une suite de chef-d’œuvres comme Mitchum ou Peplum (publié dans (A Suivre) puis en album chez Cornélius) qui suscitent l’admiration des amateurs de beau graphisme. Il participe à l’aventure de L’Association avec Le petit Christian (dont le deuxième tome vient de paraître récemment), un ouvrage aux accents autobiographiques comme son Blotch (prépublié dans Fluide Glacial, album chez ce même éditeur). Il est de toutes les aventures de la bande dessinée contemporaine publiant aussi bien à L’Association que chez Cornélius ou aux Requins Marteaux dans la Revue Ferraille.
Son Vitesse moderne est un des bijoux de la collection Aire Libre (Dupuis) qui n’a pas réussi cependant à le fidéliser. On lui doit un Donjon Monster : Mon fils le tueur réalisé avec Joann Sfar et Lewis Trondheim pour Delcourt.
Récemment, il a publié coup sur coup trois ouvrages de grande qualité aux éditions Futuropolis : C’était le Bonheur, La Volupté et La Beauté.
« Le Mozart de la bande dessinée »
Soyons clairs : le prix est amplement mérité. Blutch est un des créateurs de bande dessinée les plus admirés, aussi bien en France qu’internationalement. Dans nos pages, le réalisateur Patrice Leconte en parlait en ces termes : « Je crois que ce qui me plaît, c’est essentiellement son dessin, sa liberté, son aisance graphique. Je retrouve en lui ce qui m’enthousiasmait chez Jean-Claude Forest qui était extraordinaire de liberté d’expression. J’ai l’impression que ces gens-là dessinent aisément. Ce dessin qui n’est jamais laborieux, moi qui ai toujours été laborieux, me touche infiniment. Reiser ne devait pas être laborieux non plus, mais ce n’est pas pareil. Chez Blutch, il y a une aisance et une grâce, une sensualité, de la rêverie.
Il peut s’exprimer avec un stylo-bille tout en téléphonant, mettre la couleur avec du pastel… Pour moi, cela tient du prodige. On sait très bien que les arts : la musique, la peinture, le dessin… peuvent se travailler dans des écoles ; mais on sait très bien dans un même temps qu’il y a certaines fées particulières qui se penchent sur certains berceaux et qui donnent le don de la musique à Mozart, et celui du dessin à Blutch. Ils ont une avance considérable sur les autres car ils ont ce don. Quand je vois comment dessine Blutch, je ne sais pas s’il s’en rend compte, je n’en ai jamais parlé avec lui, mais il a pour moi un supplément d’âme. »
On ne peut mieux dire.
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.
Participez à la discussion