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Décès de Guy Peellaert, l’auteur de Jodelle et de Pravda

Par Didier Pasamonik (L’Agence BD) le 18 novembre 2008                      Lien  
Né à Bruxelles le 6 avril 1934, Guy Peellaert n’a été qu’un météore dans l’histoire de la bande dessinée créant pour Losfeld deux albums marquants : « Jodelle » et « Pravda la survireuse ». Son apport esthétique révolutionna le genre. Il vient de décéder ce lundi 17 novembre à Paris à l’âge de 74 ans.
Décès de Guy Peellaert, l'auteur de Jodelle et de Pravda
Les aventures de Jodelle (1966)

« Ses bandes dessinées, disait Fellini, étaient la littérature de l’intelligence, de l’imagination et du romantisme. » Plasticien hors pair, Peellaert était cette autre figure de la BD belge qui révolutionna non seulement le 9ème Art mais l’art tout entier. Il incarnait le Pop Art mieux que quiconque, audacieux dans ses expérimentations, novateur dans ses techniques, synthétisant parfaitement son époque où la liberté des mœurs, la société de consommation, la révolution sexuelle, la politique même se cristallisaient dans un vulgaire chic et criard, mais élégant et inventif, devenu l’étendard d’une création opportuniste et raffinée.

Pravda la survireuse (1967)
Au Seuil à partir du 15 décembre 2008

On retiendra de lui ces filles sexy et longilignes portant des bas de footballeur, profilées comme des mannequins psychédéliques bardés d’accessoires et dont les traits rappelaient la sophistication de Sylvie Vartan ou de Françoise Hardy dans leur période glamour. C’est d’abord Jodelle (1966), prépublié dans Hara Kiri qui le fait connaître puis Pravda la survireuse, seule bande dessinée reconnue comme une composante du Pop Art. Elles constituent, avec Barbarella, toutes publiées chez Éric Losfeld, les premières femmes ostentatoirement sexuées du monde de la bande dessinée, marquant au passage dans nos contrées la naissance de la bande dessinée adulte, et non pas « pour adultes », à l’intention du grand public.

Peellaert abandonna ensuite la BD pour se consacrer à la peinture et à l’illustration notamment pour des affiches de films : Taxi Driver, Short Cuts, L’Argent, Paris, Texas et Les Ailes du désir,… , des pochettes de disques pour Les Rolling Stones, David Bowie, Étienne Daho, Lio,… ou des génériques d’émission de télévision. Son recueil d’illustrations Rock Dreams (Albin Michel, 1974) s’était vendu à plus d’un million d’exemplaires. Usant de toutes les techniques (gouaches acrylique, photo,..), ses derniers travaux utilisaient la palette graphique sur ordinateur.

2009 devait être une « année Peellaert » : Pravda la survireuse devait ressortir au Seuil le 15 décembre prochain et des dessins animés tirés de son travail étaient en cours de développement. À l’occasion de l’année BD 2009 en Belgique, le Palais des Beaux-Arts devait lui consacrer une expo conjointe avec Jean-Claude Forest, Guido Crepax et Paul Cuvelier : « Les années sexties  » sous la houlette de Pierre Sterckx. L’artiste avait donné son accord et réunissait les œuvres avec enthousiasme. Espérons que cette disparition inopinée n’entrave pas ces beaux projets.

Une page de Pravda la survireuse (1968)
Editions du Seuil

(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))

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11 Messages :
  • Cherchez le point commun entre ces quatre mousquetaires de la BD, unis pour le meilleur et pour le pire ?

    De mémoire, ces deux livres ont troné en bonne place chez les libraires branchés de l’époque jusqu’à 1980 environ. Je n’ai rien à dire sur Jodelle, Pravda me semble avoir eu plus d’impact visuel. Il y a d’abord cette couverture que l’on croirait dessinée par un Warhol en forme. Le nom de l’héroïne évoque les rêves fous que suscitait le communisme à l’époque. Il y a enfin le comportement de l’héroïne : elle se sert de sa ceinture comme d’un fouet pour flageller les méchants hommes qui la contrarient. Une figure du féminisme en avance sur son époque, donc ! Cordialement

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    • Répondu par nom le 19 novembre 2008 à  01:07 :

      "Il y a d’abord cette couverture que l’on croirait dessinée par un Warhol en forme"

       ??? Allons, connaissez-vous l’oeuvre de Warhol ?! Rien à voir graphiquement (rien à voir dans le fond aussi, mais je ne vais pas développer ici...)

      Le Pop-Art n’était pas uniforme, son interraction avec la bande dessinée fut occasionnelle, voire délibérée, servant un propos critique. Qq exceptions comme le suédois Öyvind Fahlström qui s’intéressa en profondeur sur le médium (ex : bd de "Krazy Kat" faites d’éléments aimantés amovibles, ou de collages -"Festin sur Mad"). Ou un des précurseurs du Pop-Art, Jess Collins, pour un collage surréaliste de "Dick Tracy" (Tricky Cad).

      L’incursion de Warhol dans le domaine de la bd fut pratiquement inexistante ("Dick Tracy" ??? à ses touts débuts). Warhol était beaucoup plus intéressé par la représentation iconographique. J’omets sciemment Lichtenstein, car son art se concentrait moins sur la bd que sur la diffusion de certains stéréotypes graphiques (un nouveau clacissisme ?) par le biais de l’image imprimée.

      Je vous défie de me présenter l’oeuvre d’un artiste Pop dont Pellaert aurait pu être l’imitateur ! Rendez à Pellaert la contribution unique qu’il fit non seulement au Pop-Art mais aussi à la BD. Et svp, cessez de voir ce genre à la traîne des mouvements artistiques. Il ne l’a jamais été : Cliff Sterett, Herrimann avait une audace graphique que Miro n’approcha en peintures qu’une décennie après eux.

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      • Répondu par nom le 19 novembre 2008 à  07:45 :

        > L’incursion de Warhol dans le domaine de la bd fut pratiquement inexistante

        Quelle inculture ! Et Disney ?

        Vous oubliez aussi Erro.

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        • Répondu par nom le 19 novembre 2008 à  12:49 :

          et bien non, il faudrait relire vos livres sur Warhol. Il n’a jamais fait de BD, certes, mais a largement rendu hommage aux icones les plus connues (Superman et Batman, notamment, et quelques personnages Disney en prime).

          Ma comparaison se limitait néanmoins à la technique : une ligne grasse qui s’étend à l’ombre, un visage en gros-plan, des couleurs acryliques très contrastées. Pour le reste, je m’intéresse plus à la BD qu’au pop-art, Pellaert a fait partie du mouvement pop-art, et c’est tout.

          François Pincemi

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          • Répondu par Alex le 21 novembre 2008 à  00:44 :

            >et bien non, il faudrait relire vos livres sur Warhol

            Merci, mais je crois pas en avoir besoin. Je vous recommande, par contre, la lecture de son journal qui est un véritable plaisir coupable !

            > Il n’a jamais fait de BD, certes, mais a largement rendu hommage aux icones les plus connues

            Relisez mon message, j’écrivais "Warhol était beaucoup plus intéressé par la représentation iconographique". Nous sommes donc bien d’accord sur ce point. Mais que la représentation iconographique soit interprétée comme un hommage...? Ses boîtes de "Brillo", un hommage a la lessive ?

            Il y a souvent une certaine servilité, une insécurité profonde chez les amateurs de bd. Les messages postées ici en témoignent : l’esthétique bd doit être interprétée comme un hommage. On jongle allègrement avec les genres, Psychédélisme ? Pop-Art ? A la recherche d’une validation. Et la contribution unique du créateur de bd (Peellaert) s’estompe dans le jeu des comparaisons.

            Erro ? Il a peint des super-héros, utilise les signes conformes à la bd : Paf ! Ça veut dire qu’il y a une interraction avec le genre. Désolé, ce n’est pas le cas. Erro -dont j’apprécie l’esthétique- utilise la bd à ses propres fins.

            Je ne recommenderai jamais assez -comme mentionné plus haut- l’oeuvre de Öyvind Fahlström (en googlant son nom vous arriverez sur le site officiel que je n’ai plus en mémoire). De véritables travaux sur la bd. Son oeuvre n’est pas limitée à ce genre mais durant une certaine période il créa à partir d’éléments de bd des peintures amovibles et aimantées permettant au gré du spectateur de ré-agencer ces éléments pour la plupart abstraits et néanmoins réminisçant d’une certaine école de bd classique, américaine, en une composition variable.

            C’est ce que j’appelle une véritable réflexion sur le genre. La pure représentation iconographique est dénuée de cet aspect ludique liée à lecture de bandes dessinées et dessert d’autres motifs.

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      • Répondu par nom le 19 novembre 2008 à  19:42 :

        >Quelle inculture !

        Trop aimable...

        >Et Disney ?

        Les sérigraphies warholiennes de Mickey ont tout autant de rapport avec la bd que ses boîtes de Campbell n’en ont avec la soupe à la tomate.

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  • Pravda plus Psychédélique que Pop Art.

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    • Répondu par nom le 19 novembre 2008 à  20:03 :

      "Pravda plus Psychédélique que Pop Art."

      Non. Le Psychédélisme, en peinture, est un mouvement bien particulier se basant sur l’expérience hallucinogène. Les oeuvres y sont fourmillantes de détails ou empreintes de mysticisme oriental (mandalas). En bande dessinée, on peut citer entre autres comme représentant du psychédélisme Rick Griffin ou Moscoso. Deux dessinateurs très éloignés dans leur trait et leurs thèmes de Peellaert.

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      • Répondu par nom le 20 novembre 2008 à  11:03 :

        Plus mode que psychédélique, alors...

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  • Peellaert, avec deux "e", s’il vous plait.

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