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Le roman graphique « Le Fils de Taiwan » de Yu Pei-Yun et Zhou Jian-Xin (Ed. Kana) reçoit le prestigieux Prix Émile Guimet de littérature asiatique.

Par Didier Pasamonik (L’Agence BD) le 28 février 2024                      Lien  
Lancé par le musée en 2017, le Prix Émile Guimet de littérature asiatique récompense « l’œuvre originale d’un auteur ou d’autrice originaire d’Asie, récemment traduite et éditée en France. » Pour la première fois cette année, un prix est décerné à un « Roman graphique », le musée entérinant la place croissante des cultures populaires asiatiques, dont la bande dessinée, dans nos sociétés.

L’objectif du Prix est de couronner une œuvre « qui fait écho aux grandes questions de notre temps, telles que la liberté de conscience et d’expression, l’adhésion ou le refus d’une identité et d’une histoire collective, l’universalité, la citoyenneté et les grandes questions environnementales.  » La présidence du jury de ce 7e Prix Émile Guimet est assurée par l’autrice et productrice Laure Adler, aux côtés de Yannick Lintz, présidente du musée Guimet, de Pierre Haski, journaliste et président de Reporters sans frontières, de Nicolas Idier, écrivain et sinologue, de Didier Pasamonik que nos lecteurs connaissent bien, de Constance Rivière, écrivaine et directrice générale de l’établissement public du Palais de la Porte Dorée, et de Ryoko Sekiguchi, autrice et traductrice japonaise.

Ils ont élu, outre Impossibles adieux, de Han Kang aux éditions Grasset, de Corée du Sud (traduit du coréen par Kyungran Choi et Pierre Bisiou), le roman graphique Le Fils de Taiwan de Yu Pei-Yun et Zhou Jian-Xin (Ed. Kana). Le prix sera remis demain soir au Musée Guimet lors d’une cérémonie en présence de la scénariste Yu Pei-Yun.

Le roman graphique « Le Fils de Taiwan » de Yu Pei-Yun et Zhou Jian-Xin (Ed. Kana) reçoit le prestigieux Prix Émile Guimet de littérature asiatique.
© Yu Pei-Yun et Zhou Jian-Xin. Ed. Kana.

Le Fils de Taïwan, dont le dernier et quatrième volume vient de paraître raconte la biographie de Kunlin Tsai, décédé l’année dernière à 93 ans, qui vécut pendant l’occupation japonaise de son pays (1895-1945) une enfance insouciante, jusqu’au moment où, à la suite de la Seconde Guerre mondiale, alors que la Chine est en pleine guerre civile, Tchang Kaï-chek, président de la République de Chine, se retire sur Taïwan, installant un gouvernement dictatorial et une « terreur blanche » à la chasse aux communistes. Kulin Tsai, qui vient d’entrer au lycée, participe à un club de lecture, et se retrouve accusé à tort de faire partie d’un groupe politique « rebelle ». Il est arrêté et embarqué avec des milliers autres prisonniers politiques sur « l’île verte » pour y être « rééduqué ». Il va y vivre pendant dix ans dans des conditions concentrationnaires.

La scénariste Yu Pei-Yun et sa traductrice lors d’une interview qui sortira prochainement sur ActuaBD. Photo : Hippolyte Arzillier.

La situation se détendant peu à peu, grâce à une économie qui décolle, il est finalement relâché, non sans devoir se soumettre à un simulacre de repentance face à l’autorité carcérale. Il retrouve sa famille et la vie « normale », mais reste pour la société un ancien détenu. Il va néanmoins se faire une place comme éditeur et, en fondant le magazine de bandes dessinées « Prince », il participe à un mouvement sociétal qui, en dépit de la censure, développe une sorte de contre-culture qui ouvre la voie à la démocratisation d’un pays en plein essor économique. Dans les années 1970, face au retour de la Chine sur la scène internationale, Taïwan est obligée à se retirer des Nations Unies et la menace se fait pesante.

© Yu Pei-Yun et Zhou Jian-Xin. Ed. Kana.

Ce roman graphique raconte donc, à travers Kunlin Tsai, un siècle de l’histoire de Taïwan. Une œuvre mémorielle, que l’on peut ranger aux côtés de Maus de Spiegelman, de Gen d’Hiroshima de Keiji Nakazawa, de Persépolis de Marjane Satrapi, ou de L’Arabe du futur de Riad Sattouf..

« J’ai choisi le format du roman graphique pour être lisible par le plus grand nombre, nous dit Yu Pei-Yun qui a travaillé plusieurs années avec Kunlin Tsai pour recueillir son témoignage, je suis très honorée de recevoir ce Prix. Maus de Spiegelman m’a inspirée dans la mesure où je me représente, dans le quatrième tome, en train de converser avec Kunlin Tsai, alors que jusqu’ici, il était au centre de la narration. C’était nécessaire, car je devais synthétiser plusieurs dizaines d’années d’évolution de la société taïwanaise. »

La scénariste Yu Pei-Yun.
Photographie : Hippolyte Arzillier.

Ce faisant, cette série, accompagnée d’un impressionnant dossier historique, est un témoignage éclairant sur l’histoire de Taïwan et sur la situation politique qui est la sienne aujourd’hui.

(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

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Code EAN : 9782505115861

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