Une scène cernée dans le gaufrier d’une page. De la régie part un halo de lumière qui aboutit sur un personnage, une femme. Son monologue commence. Le lecteur entre doucement dans l’univers de la narratrice, une épouse restée au foyer « pour garder la maison » tandis que, chaque jour, son mari part au travail. Présence, absence. Tel est le tempo. Il fait nuit et elle ne dort pas, ou plutôt, elle ne dort plus. Elle s’adresse à un interlocuteur que l’on découvre dans la pièce. Il est masqué, c’est son mari. Ou plus exactement la figure du mari.
Il s’ensuit un dialogue qui arpente toute l’aridité de la relation, l’épaisseur du silence qui s’est installé dans le couple. La dramaturgie est linéaire, se permet quelques échappées un imaginaire fantomatique ténu et rare. Entre incompréhensions et peurs, la relation se solde par un abandon, sans que l’on puisse juger s’il est le résultat d’une lâcheté ou de l’ennui. Sans cruauté, pas de théâtre, postulait Arthaud. Ici, à considérer ces êtres sans qualité et sans ambition autre qu’un bonheur simple, la cruauté réside avant tout dans le supplice taraudant de l’absence.
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
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