Comment s’est effectué le choix de venir exposer ici à Bruxelles ?
Cela s’est décidé avec Bernard Mahé, de la Galerie 9e Art à Paris, l’endroit où j’expose normalement. Et puis je connais aussi Eric Verhoest depuis des années. J’étais donc en territoire de connaissance.
Avez-vous effectué le choix des planches avec ces deux galeristes ?
Le choix des planches ? Mais c’est moi le patron !! (rires) J’ai choisi les planches pour former un équilibre. On me demande toujours certains albums en particulier, mais j’en propose toujours d’autres, et le public réagit globalement très bien !
Avez-vous volontairement présenté un échantillon qui embrasse toute votre carrière sur Valérian ?
En toute transparence, je n’ai aucune idée de ce que le public recherche. Sauf qu’on me demande toujours des planches avec Laureline. Bien entendu, je l’ai souvent dessinée, mais pas de manière systématique ! Et je ne cherche jamais à mettre Laureline au premier plan en me disant que cela aidera à vendre la planche.
Aux côtés des planches, et de leurs bleus de coloriage, on retrouve des illustrations couleurs et des couvertures. Est-ce cette technique qui vous procure le plus de plaisir actuellement ?
Cela fait longtemps que je travaille à la gouache, ce qui s’avère adéquat pour de grandes illustrations. Mais je laisse les couleurs des planches à ma sœur Évelyne [Tran-Lê] car cela me soulage d’un énorme travail. Et comme elle le réalise avec talent, tout le monde s’y retrouve.
Donc, vous alternez illustration et planche, comme vous l’avez réalisez dans votre dernier Valérian : L’Avenir est avancé ?
Je suis un dessinateur contrarié… et contrariant. Soyons clairs : je ne suis pas un fou de dessin. C’est difficile, je dois sortir mon dessin au forceps, je me bagarre avec lui. Bref, je ne suis pas un de ces pisse-copies, qui dessine en dormant, en digérant, etc. Certains auteurs ne savent pas vivre sans dessiner, se baladant toujours avec un carnet à la main, et ils s’embêtent s’ils n’ont pas un crayon et un papier sous le nez. Moi, c’est tout le contraire. Je me mets au travail, car je ressens l’envie de réaliser un dessin, parce que c’est convenu, demandé. Et cela demeure un combat.
Vous devez être porté par une réelle motivation.
Exactement ! Et en cours de réalisation, je me fais beaucoup de reproches, ce qui me pousse à recommencer nombre de fois, car le rendu ne me satisfait pas pleinement : mon premier client, c’est moi ! J’ai donc besoin que le dessin me plaise, pour que je consente à le lâcher. Pas que je sois content de moi-même, mais au moins accepter que j’ai bien essayé, et que j’ai été au bout de mes capacités. Après, le public aimera, ou pas. Comme c’est le pour n’importe quel auteur ou artiste.
Vous venez donc de publier le second tome dédié aux histoires courtes de votre série. Quelles sont vos envies avec Pierre Christin ? Avez-vous l’énergie pour vous lancer dans une nouvelle aventure ? Ou préférez-vous passer la main ?
Avec Pierre, nous avons beaucoup réfléchi à d’éventuelles successions, mais rien n’est actuellement arrêté. Quant à me relancer à mon âge dans une nouvelle aventure de 54 ou 60 planches, cela représente trois ans de travail si tout va bien ! Rendez-vous compte, il m’a fallu cinq années pour réaliser ce dernier album L’Avenir est avancé, car nous avons quelques pannes de moteur, Pierre et moi. Ces problèmes de santé sont d’ailleurs parvenus simultanément, la preuve qu’on forme un vrai tandem d’auteurs !
Vous préparez néanmoins un nouvel ouvrage ?
Tout-à-fait, il s’agit d’un recueil d’illustrations réalisées tout au long de ma carrière, destinées en leur temps à des journaux, au cinéma, à des recherches pour des projets qui ont ou n’ont pas abouti. On va retrouver un peu de Valérian, mais pas uniquement, car je réserve normalement le dessin de mes personnages pour mes albums. Il s’agit donc d’une autre facette de mon travail. Et je bénéficie des conseils de quelques personnes pour affiner le choix final : untel apprécie le dessin de cette machine, alors que j’ai l’impression qu’il s’agit d’un vieil engin sans intérêt ! Bref, on discute, et se construit progressivement.
(par Charles-Louis Detournay)
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Valérian tome 23 : L’Avenir est avancé , par Christin & Mézières (Dargaud)
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Photo en médaillon : Charles-Louis Detournay